Résidence en Norvège

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Sous les chênes de Fabre (France), se dresse une cabane en tôle supportant un dôme translucide. Incongrue au milieu du paysage, ne donnant à voir que sa matérialité singulière, elle se détache du bâti local d’où autant de composants d’origine industrielle seraient proscrits. Quelle sont donc les visées de ce mirador aveugle émergeant d’un sous-bois tarnais ? Est-ce un abri pour d’improbables visiteurs perdus sur le causse ? Est-ce un lieu le stockage de pièces à venir ? Sont-ce d’hypothétiques événements entrevus comme promesses d’échanges? Si l’aspect défensif et l’exiguïté de la construction n’incitent guère à s’y installer, la cabane éveille la curiosité de ceux qui y pénètrent. Ses fonctions indéterminées captivent le visiteur un instant cloîtré, qui ne peut pourtant pas y assouvir ses fantasmes de protection. A ce jour, seuls les insectes ont osé franchir le seuil pour coloniser durablement cet espace aussi attirant qu’inquiétant.

Ce sont ces intrus que Thierry retrouve à Oslo, incarcérés dans le double vitrage de l’atelier (Ekely). Loin de ses repères, c’est autour d’eux qu’il imagine son dispositif.

A Moss, face à la mer, trois modules constitués chacun d’un dôme en plastique surmontant une caisse de bois, sont déployés comme de potentiels traquenards destinés aux  insectes venus du large. Pendant qu’à l’intérieur du centre d’art, nous est rappelé le stratagème : une série d’images où le grouillement suspendu des petites bêtes piégées dans la cabane tarnaise en découd avec une cohorte de cocons inertes pullulant au sol.

Mais, le piège se referme-t-il vraiment sur les victimes désignées ? Insecte ou visiteur, quel est celui qui tombe dans le chausse-trappe ? Souvenons-nous de l’aspect guerrier des pièces plus anciennes : le caractère utopique du dispositif norvégien ne constitue-t-il pas l’appât d’une autre machination ? Les constructions, les assemblages et les images produits par Thierry Boyer suscitent un malaise qui agit comme générateur de questions et d’associations d’idées. En dépit de leur immobilité, ces réalisations ne traitent-elles pas de l’instabilité du regard qui fait chavirer régulièrement nos émotions et notre conception de la réalité ?

Nathalie GRANGIS, 2001.